Contrairement à ce que peut laisser penser la photo, le but de cet article ne sera pas de faire le blâme de la romance ou des feel-good. Personnellement, ce ne sont pas des genres qui m’attirent et j’en ai lus très peu, au point de ne pas avoir, à mon sens, suffisamment de recul pour avoir un avis pertinent. En littérature, comme pour les films, les intrigues qui mettent au premier plan les relations intimes, la séduction, la recherche de l’amour comme sujet principal m’intéressent peu. Même si je suis sûr que beaucoup de romances ou de bit-lit ne se limitent pas à ça.

Cependant, comme le laisse aussi suggérer le titre, l’amateur de magie, de cape et d’épée, d’arche spatiale et de créatures de cauchemars que je suis, apprécie énormément les histoires d’amour. Mais en littérature, au théâtre, ou au cinéma, il me semble qu’une histoire d’amour pertinente doit abandonner les stéréotypes du réel et se concentrer sur les subtilités que l’on ne veut pas simplement lire, voir ou entendre… mais que l’on doit ressentir.Je vous propose donc d’aborder, selon moi, les points essentiels pour raconterune belle histoire d’amour.

 

S’identifier aux personnages : la variable incertaine

 

Pour entrer dans l’histoire, pour partager les sentiments, les émotions des protagonistes, il faut pouvoir être proche d’eux, y trouver des affinités avec soi-même, ou alors y percevoir un idéal dans lequel on prend plaisir à se projeter. Avec un tel éventail de possibilités, l’auteur ne peut se soumettre aux désirs des lecteurs et, artistiquement, il n’a aucun intérêt à le faire. Surtout dans des œuvres de fiction, où la réalité à laquelle nous sommes contraints se voit modifier avec plus ou moins d’intensité. De ce fait, ce ne sont pas les personnages eux-mêmes qui sont réellement importants dans une histoire d’amour. Mais les interactions entre eux et leurs actions dans l’intrigue.

 

Une histoire d’amour doit avoir de la retenue

 

Alors déjà, quand ça commence avec « il est canon », « elle est bonne », c’est mort. Les descriptions physiques redondantes, les interminables ébats à qui racontera le plus cru, ou la remise en question sentimentale, au premier degré, je trouve ça artistiquement pauvre. Argumenter comme vous voulez, mais les avant-bras de Duncan sont inintéressants ; Tyler n’est pas un beau ténébreux, il est juste paumé ; et Kimberley n’est pas une héroïne parce qu’elle respecte un prorata discutable prude/aguicheuse.

Une histoire d’amour doit avoir de la retenue : sexualiser un personnage ne le rendra pas intéressant. La beauté, le charme, la performance physique doivent être de simples caractéristiques, pas des conditions irrévocables à l’attirance de deux protagonistes. La complicité, les actes, les conflits, voilà ce qui peut faire naître des sentiments amoureux forts, autant chez les personnages eux-mêmes que chez le lecteur ou le spectateur.

Dans la littérature classique, on peut se référer à la courtoisie, point central de la légende de Tristan et Iseult. Si je devais citer des œuvres bien plus modernes et carrément actuelles, je penserais à La Passe-miroirde Christelle Dabos : la relation entre Ophélie et Thorn (j’insiste sur « relation) est très froide, distante, et donc immédiatement plus subtile et pertinente. Exemple au cinéma, dans Edward aux mains d’argentde Tim Burton, Edward montre son amour à Kim en commettant un délit sur sa demande et quand elle lui demande pourquoi, il répond simplement « Parce que tu me l’as demandé » : « Je t’aime » n’est pas la seule façon de dire « je t’aime ». Autre exemple, par amour pour Lily Potter, Rogue trahit son maître, ses convictions et va même jusqu’à protéger celui qui aurait pu être son fils, mais qui est celui de son ennemi, et même après la mort de sa dulcinée. Mais que c’est beau, bordel !

Bon, j’ai pris des exemples super connus, et appartenant au fantastique, mais en résumé, j’en suis venu à me dire que raconter une belle histoire d’amour se résume en une phrase : « de grandes actions et peu de mots »(© Anthony Lamacchia – taisez-vous, je suis un artiste). Et donc, irrévocablement, qu’est-ce qui va aider à rendre l’histoire d’amour impactante ?

 

Le drame : l’ingrédient indispensable

 

Bah oui, je ne vous apprends rien, une histoire toute belle, toute rose, ça n’a pas grand intérêt. Pourquoi ? Mais parce qu’il n’y a pas d’enjeu(x) ! Si tout se passe bien, si tout roule comme sur des roulettes, pas sûr que l’histoire suscite de l’émotion… En tout cas, pas beaucoup.

C’est dans le drame que l’on trouve l’enjeu et c’est l’enjeu qui donne son intérêt à l’intrigue. Et une histoire d’amour, comme son nom l’indique, c’est bel et bien une intrigue. L’exemple le plus simple et le plus utilisé : l’amour impossible.Eh oui, quoi de plus tragique et donc susceptible de créer de la tension, de l’intérêt pour le lecteur ou le spectateur que l’impossibilité pour deux cœurs de s’unir. Et attention, je parle d’une vraie impossibilité, pas le désaccord du beau-père, la virginité jusqu’au mariage, la niaiserie du triangle amoureux, ou les goûts musicaux. Et la raison numéro une pour rendre l’amour impossible est… roulement de tambour… la mort ! J’ai pas dit que ça serait original.

La mort et ses dérivés bien sûr : folie, perte de l’âme, malédiction, maladie, déchéance… bref, tout ce qui mène, si le personnage cède à l’amour, à un malheur irréversible.La figure de proue reste Roméo et Juliettede Shakespeare. Mais plus récemment, je vais citer Richard et Kahlan (les héros de l’Épée de véritéde Terry Goodkind) qui ne peuvent s’unir sans que Richard ne perde l’esprit. Et dans le cycle Drenaïde David Gemmell, nous avons Jianna qui ne peut rester unie à Skilgannon si elle veut récupérer son royaume.

 

Bref, vous l’aurez compris, selon moi, une histoire d’amour procure plus d’émotions lorsque la fatalité s’en mêle et elle est d’autant plus pertinente quand elle est amenée lentement, en arrière-plan, avec retenue.

Encore une fois, cela est mon propre avis. Et si certains d’entre vous seront d’accord, je suis sûr que d’autres auront aussi leurs propres ingrédients favoris et indispensables à une belle histoire d’amour.

N’hésitez pas à me dire en commentaire, à partager vos couples de fictions préférés.

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Bonne Saint-Valentin tout le monde et je termine avec l’une des meilleures définitions de l’amour que j’ai pu entendre :

 

« Alors écoutez-moi quand je dis que l’amour n’est pas une invention à nous. Il est observable et tout puissant. Il a forcément un sens. Peut-être que l’amour a un sens plus profond et que nous ne pouvons pas encore le comprendre. Ce peut être un témoignage, la marque d’une dimension supérieure que nous ne pouvons pas encore consciemment percevoir. Je vais à l’autre bout de l’univers, attirée par un homme parti il y a dix ans et qui selon toute vraisemblance est mort. De toutes les choses que nous percevons, seul l’amour transcende les dimensions temporelles et spatiales. Peut-être bien qu’on devrait accepter en confiance ce qu’on ne saisit pas encore. »

 

Amélia Brand, interprétée par Anne Hathaway – Interstellarde Christopher Nolan