Fin 2020, les éditions Le Bélial ont ajouté à leur collection « Une heure lumière » la novella de John W. Campbell intitulée La Chose, publiée pour la première fois en 1938. Ça fait plaisir de revoir ce texte dans notre hexagone fraîchement revu par la traduction de Pierre-Paul Durastanti, d’autant plus que l’adaptation de John Carpenter est l’un de mes films d’horreur préférés. Et justement, pour l’occasion, je vous propose de parler du livre, mais aussi du film.

John W. Campbell (1910-1971), auteur américain et grande figure de la science-fiction. Outre sa casquette d’auteur, il éditera de nombreux auteurs de SF et sera un proche de Isaac Asimov. Outre La machine suprême, c’est surtout La chose qui restera son œuvre la plus connue. Elle sera d’ailleurs adaptée deux fois au cinéma, d’abord en 1951 par Christian Nyby et ensuite par John Carpenter en 1982.

John Carpenter, on ne le présente plus, est l’un des plus connus et des plus influents réalisateurs et producteurs de films d’horreur et de science-fiction américains. L’œuvre du bonhomme est culte et l’on peut compter parmi les films les plus connus Halloween, Invasion Los Angeles, Christine, L’Antre de la folie, et bien sûr, The Thing.

Mais dans un premier temps, parlons du livre.

L’histoire se déroule en Antarctique, une équipe de scientifiques découvre un vaisseau extra-terrestre prisonnier des glaces depuis des millions d’années. Les types utilisent de la dynamite pour y accéder mais finissent par tout bousiller. Cependant, ils parviennent à extraire un corps prisonnier de la glace et le ramènent à leur base. Et bien sûr, comme ils veulent l’examiner, ils attendent que la glace fonde… Mais l’effrayante créature, loin d’être morte, échappe à leur surveillance. Rapidement, ils comprennent que la bête est capable de prendre l’apparence de n’importe quel être vivant jusqu’à copier son comportement.

 

« Bon sang, je fais des mauvais rêves depuis que j’ai croisé le regard de ces trois yeux rouges. De vrais cauchemars. Elle dégèle, elle revient à la vie. Elle n’était pas morte, ni même totalement inconsciente pendant ces vingt millions d’années. Non, elle n’était que ralentie. Elle attendait, prenait son mal en patience. Et vous allez rêver, vous aussi, pendant que cette saloperie dont la Terre n’aurait jamais voulu dégouttera dans la Maison Cosmos cette nuit. »

John W. Campbell – La Chose

 

Comptant à peine plus d’une centaine de pages, ce huis clos horrifique joue sur la paranoïa des personnages pour distiller son ambiance anxiogène et oppressante. Impossible pour les personnages comme pour le lecteur de se douter de qui est la chose. Logique et rigueur seront de mise pour débusquer la créature, sans sombrer dans la folie.

Comme beaucoup de textes de science-fiction de cette époque, on assiste au duel du scientifique contre la terrifiante créature de l’espace qui sème mort et destruction. Peu d’action, beaucoup de dialogues, de réflexions, mais assurément une tension qui tient en haleine de bout en bout. La créature, menace invisible, restera cachée une majorité du temps. On assiste là aux premières inspirations d’Alien et autres abominations des ténèbres qui transforment les lieux qu’elles hantent en geôles de cauchemars.

Parlons du lieu : l’enfer blanc, l’Antarctique, véritable prison naturelle où le froid et les tempêtes de neige empêchent toute retraite. Pour rappel, au début du 20ème siècle, les expéditions vers le continent étaient très en vogue et n’ont donc pas manqué d’inspirer de nombreux écrivains de l’époque. Je ne citerai que Lovecraft et ses Montagnes Hallucinées dont l’action se situe dans le même décor. L’Antarctique, là où les extra-terrestres se cachent pour mourir. Et encore aujourd’hui, il reste un endroit qui nourrit l’imagination.

Pour ma part, ce fut une lecture très agréable, parfaitement adaptée au format court. Beaucoup de personnages cependant, j’ai été un peu perdu pendant le premier tiers avant de situer tout le monde. Des différences notables avec le film, notamment la fin, qui reste cohérente mais un peu capillotractée. 

 

Venons-en au film justement.

Le projet passera entre plusieurs mains avant d’arriver dans celles de Carpenter et le scénariste Bill Lancaster s’y prendra à plusieurs reprises pour arriver au scénario final. Face au E.T. de Spielberg, le film sera mal reçu à sa sortie en salle et n’obtiendra son succès que plus tard avec ses rediffusions. Quant aux effets spéciaux, c’est le jeune Rob Bottin qui est appelé pour donner vie à l’horrible créature.

L’action se déroule toujours en Antarctique, mais les évènements se déroulent différemment, comme la découverte de la créature, la mise en quarantaine de l’un des personnages, et le dénouement, propre à Carpenter avec son duo de héros survivants. Le rôle principal sera confié à Kurt Russel, acteur emblématique du réalisateur.

Aussi anxiogène que la nouvelle, le film fait monter la tension avec l’attente de la créature, sa première apparition prenant par surprise le spectateur. Terrifiant, le monstre de Carpenter inspire l’horreur de par son aspect contre-nature, véritable ignominie qui pourrait presque faire penser à du Cronenberg tant la chair est torturée et mutilée. Mais au-delà de ça, tout comme pour la nouvelle de Campbell, l’effroi se trouve dans la paranoïa, la peur de l’autre qui mène à la folie. Bien moins scientiste que le livre, le film de Carpenter se veut plus humain dans le traitement de ses personnages et dans son sous-texte, ce qui va dans le sens de la fin ouverte à plusieurs interprétations. Une fin comme je les aime.

 

Vous l’aurez compris, si vous êtes fan de SF rétro avec un extra-terrestre monstrueux et destructeur, ou que vous soyez un amateur de Lovecraft comme du premier Alien, La Chose, livre comme film, devrait vous plaire.

Merci de m’avoir lu. J’espère que cet article vous a plu, n’hésitez pas à me dire en commentaire si le livre ou le film vous tente. Si vous avez déjà lu ou vu The Thing, qu’en avez-vous pensé ? Quel est votre film ou livre d’extra-terrestre préféré ? N’oubliez pas de vous inscrire à la newsletter pour ne rien rater.

À la prochaine.