Aujourd’hui, parlons d’un auteur américain renommé : Ira Levin. Né à New-York en 1929 et mort dans la même ville d’une crise cardiaque en 2007, il aura été un dramaturge et un auteur de talent, principalement connu pour Le bébé de Rosemary, paru en 1967 et porté à l’écran par Roman Polanski en 1968. Succès mondial qui lancera la mode de la possession et de l’occulte, notamment avec des réalisations cultes comme l’Exorciste de William Friedkin en 1973 et La Malédiction de Richard Donner en 1976. Mais revenons à M. Levin qui publiera d’autres romans fantastiques et à suspens, notamment Ces garçons qui venaient du Brésil (1978), Un bonheur insoutenable (1970) et Les femmes de Stepford (1972).
Très jeune, Ira Levin se destine à une carrière d’écrivain. Vainqueur de concours et diplômé de l’Université de New-York en 1950, il commencera à travailler pour la télévision avant de commencer l’écriture de son premier roman : La Couronne de cuivre, publié en 1953. Les autres romans qui suivront seront destinés à être adaptés au cinéma, et Levin sera aussi connu pour ses pièces de théâtre, notamment Piège mortel, jouée à Broadway non stop entre 1978 et 1982 : un record.
Véritable machine à succès, l’œuvre d’Ira Levin n’est quasiment composée que de best-sellers dont fait partie le petit thriller d’anticipation Les Femmes de Stepford. On y retrouve Joana, qui emménage avec son mari et ses enfants dans la ville fictive de Stepford, typiquement la petite banlieue parfaite. Mais derrière ces femmes qui tiennent un intérieur impeccable et ces hommes qui se réunissent dans leur club privé semble se dissimuler un effrayant secret. Abordant la condition des femmes avec un postulat dystopique pertinent, Levin interroge sur le sort du beau sexe à une époque où le féminisme est en plein essor avec le MLF.

« Regardez, ma lessive est vraiment efficace, vous ne trouvez pas ? » Et, tout sourire, elle rangea le jersey aux plis impeccables dans le panier à linge.
Telle une actrice de spot publicitaire.
Ce qu’elle était, s’avisa brusquement Joana. Comme le reste des épouses de Stepford, sans exception : des actrices de pub ravies de leurs produits ménagers — lessive, cire, détergents, champions désodorisants… Des actrices fort belles, à la poitrine généreuse, mais au talent limité : elles se bornaient à jouer sans conviction les ménagères de banlieue, trop bêcheuses pour être vraies. »
Ira Levin – Les femmes de Stepford

Rien que dans cet extrait, nous avons une satyre de la société superficielle et aseptisée d’une Amérique soumise à ses images publicitaires où la femme est réduite à un automate sans libre arbitre et à l’instinct créatif ensevelie par des idéaux machistes et conservateurs.
Le style d’Ira Levin est d’une efficacité redoutable, accessible et bien pensé. Son suspens monte lentement, le décor parfait tout juste dérangé par des curiosités qui ne cesseront d’enfler jusque dans le dernier quart du livre où la tension prendra le relais avant la fin qui laissera le lecteur dans une piquante frustration.
N’ayant écrit que sept romans, aucun n’est à ignorer et sont de très bons livres, notamment ceux cités en introduction. Court, facile à lire, très bien pensé, Les femmes de Stepford reste une valeur sûre. Adapté plusieurs fois au cinéma, l’un des derniers est le film de Frank Oz, Et l’homme créa la femme (2004), avec Nicole Kidman, qui est à éviter.

« Elles ne s’arrêtent jamais, les épouses de Stepford.
Toujours au boulot, rivées comme des robots.
[…]
Rivées comme des robots,
du mariage jusqu’au tombeau. »

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