Aujourd’hui, on va parler d’un grand nom de la Fantasy moderne, j’ai nommé David Gemmell. Né en 1948 à Londres et mort en 2006 à Hastings, il était connu comme une force de la nature, un grand gaillard de deux mètres à la figure patibulaire. D’abord videur dans les bars de Soho, il sera par la suite journaliste indépendant, avant d’entamer sa carrière d’écrivain avec Légende, son premier roman publié en 1984. Il devient romancier à plein temps deux ans plus tard et sera connu notamment pour le Cycle Drenaï, constitué de plus d’une dizaine de romans, plus ou moins indépendants les uns des autres, mais se déroulant dans le même univers. Il est également l’auteur du Cycle Rigante et le Cycle de Troie, dont le dernier roman, La Chute des rois, a été achevé par sa femme, Stella Gemmell, en 2007, après sa mort.
Auteur de Fantasy, David Gemmell est un écrivain très prolifique mais à l’écriture très inégale. À ses débuts, on peut noter une certaine lourdeur dans le récit, malgré un talent certain pour le développement de ses personnages. Au fur et à mesure, son style va s’affranchir des fioritures et longueurs qui peuvent souvent parasiter le genre. Gemmell en viendra donc à développer une plume efficace et des récits épiques, mettant en scènes des figures héroïques, dépassée par leur destin – je pense surtout à Jarek Mace dans L’Étoile du matin – et des personnages bruts de décoffrage, bourru mais attachant, violent mais honorable, fier mais passionné ; des personnages qui renvoient directement à Gemmell lui-même : Druss n’est autre que son propre reflet :

« La panique régnait partout. Comment les Drenaïs allaient-ils pouvoir lutter face à une telle armée ? […] Bardan — mon grand-père — a mené une petite troupe au cœur des montagnes où l’ennemi était campé. Lui et une vingtaine d’hommes sont entrés dans le camp pendant la nuit ; ils ont trouvé la tente du roi et l’ont tué. Au petit matin, les envahisseurs ont trouvé la tête de leur roi, plantée sur une pique en plein milieu du campement. Et l’armée est rentrée chez elle.
— Une histoire intéressante, que j’avais déjà entendu, fit Borcha. Et d’après toi, qu’est-ce qu’elle nous enseigne?
— Il n’y a rien qu’un homme ne puisse accomplir s’il en a la volonté, la force et le courage nécessaire pour essayer, répondit Druss. »
David Gemmell – Druss, la légende, 1993

Quand j’ai commencé à lire Gemmell, la première chose qui m’a frappé, c’est cette écriture directe qui ne passe pas par quatre chemins. Il est loin le temps de Tolkien et de ses interminables descriptions, certes magistralement écrites, mais alourdissant un récit déjà riche. La Fantasy avait besoin d’un dépoussiérage, alors qu’on arrivait au centenaire du père de la Fantasy. Et Gemmell a fait partie de ceux qui apportèrent un souffle nouveau avec une écriture fluide qui met en avant l’action et l’émotion. Pour moi, Gemmell est un auteur de la Fantasy efficace ! Et ce, malgré des facilités (ou de la paresse, qui sait ?) dans sa diégèse. L’exemple qui me vient toujours en tête, ce sont les voyages dans le temps et l’apparition de Horga à la fin de L’Étoile du matin qui arrive vraiment comme un cheveu sur la soupe.
Mais à part ça, le style redoutable de Gemmell et sa bibliographie conséquente en font l’un des meilleurs auteurs de Fantasy des années 90 et 2000. Druss la légende m’a été offert par un ami, me disant que pour découvrir Gemmell, il fallait commencer par CE roman. Je peux affirmer qu’il avait bien raison. L’Étoile du matin reste mon préféré mais L’Écho du Grand Chant (1997), malgré un début un peu trainant, est aussi un très bon cru.