Le mois d’octobre étant arrivé, Halloween est proche. Et je me suis dit que j’allais vous parler de quelques recueils de nouvelles d’épouvante qui pourraient vous accompagner en ce début d’automne. Pour le premier, j’ai pensé à un excellent auteur que j’ai découvert par un curieux hasard.

Il y a quelques années, une collègue s’est débarrassée de plusieurs de ses livres et parmi ceux-là, se trouvait un bouquin à la couverture noire, d’un auteur qui m’était totalement inconnu mais au titre très attirant : Dans l’épouvante. Faisant quelques recherches, j’apprends que le bonhomme, Hanns Heinz Ewers (1871-1943), est allemand, qu’il a pas mal voyagé, qu’il est auteur de nouvelles et de romans fantastiques et qu’il a fricoté avec les nazis avant de se les mettre à dos. Dans l’épouvante est un recueil de nouvelles paru en 1907 et qui a apparemment eu beaucoup de succès. Pas étonnant vu le talent de l’artiste : une écriture efficace et limpide nous raconte des histoires où se mêlent la féerie et le gothique. La jeune fille blanche, le cœur des rois, la Mamaloi… n’ont rien à envier aux histoires extraordinaires d’Edgar Poe. On y parle de vaudou, de meurtres horribles et de fantômes. J’ai vraiment été happé par l’ambiance malsaine qu’arrivait à dépeindre Ewers, sa fascination pour le sang, cette façon qu’il avait de lentement faire arriver l’horreur dans ses récits.

 

« La couleur rouge parut accourir tout autour, on eût dit que la jeune fille blanche était enfoncée dans un immense bain de sang. Tremblante, cherchant du secours, elle s’accroupit. De tous les côtés, le rougeoiement voluptueux rampait vers elle. Le sol s’entrouvrait comme une gueule flamboyante. Le rouge effrayant engloutit la jeune fille blanche »

 

 

Il faisait même preuve d’un humour noir et corrosif, le Juif mort en étant sa meilleure démonstration. Mais le texte qui m’a le plus marqué est le cœur des rois où un peintre haïssant la famille royale d’Orléans, s’empare des cœurs des rois momifiés pour en faire d’excellentes couleurs afin de peindre d’effroyables tableaux et se venger de cette monarchie, utilisant même les restes comme tabac :

 

« — Et vous fîtes des couleurs avec les cœurs ?

— Oui, naturellement. C’est la seule chose à quoi peut servir un cœur de roi. Non, j’exagère : comme tabac à priser, c’est excellent aussi. Mais je vous en prie, servez-vous donc de ce Henri IV et François Ier. »

 

Je ne saurais donc trop conseiller ce recueil et même ses autres textes comme Mandragore, à tous les férues de littérature gothique allemande, ou même aux amateurs de fantastique et d’horreur, car Ewers fait selon moi partie de ces auteurs de contes qui lentement sombrent dans l’oubli, alors que leur style et leur talent semblent inaltérables.